
SOCIETE
Le Moniteur, ancêtre oublié de la presse d'information francophone
Premier journal francophone publié en Louisiane en 1794, Le Moniteur de la Louisiane a structuré l’espace public d’une société en mutation.
PAR JC JABOUIN - ASTEUR.LA, SAMEDI 27 SEPTEMBRE 2025
Crédit : Image par Pixabay
Une fondation pionnière dans la presse francophone
Fondé le 3 mars 1794 à La Nouvelle-Orléans sous le régime espagnol, Le Moniteur de Louisiane est le premier journal francophone publié en Louisiane. Son créateur, Louis Duclot, réfugié de Saint-Domingue, initie une tradition journalistique qui perdurera jusqu’au XXe siècle. Dès 1797, Jean Baptiste Le Sueur Fontaine, également originaire de Saint-Domingue, en prend la direction éditoriale, imprimant une ligne royaliste discrète. Le journal devient semi-hebdomadaire vers 1814, témoignant de son importance croissante. Il cesse de paraître en juillet 1814, bien que certaines sources évoquent une activité jusqu’en 1815. Utilisé comme organe officiel par les autorités espagnoles puis françaises, il diffusait règlements, avis légaux, annonces commerciales et actualités internationales. Sa devise latine, "ombalio, Clangor, Stridor, Taratantara, Murmur", reflétait une volonté ironique d’informer sans polémique. Conservé partiellement dans plusieurs archives, Le Moniteur reste un jalon essentiel dans l’histoire de la presse en Louisiane.
Un miroir de la société francophone louisianaise
Le Moniteur de Louisiane naît dans un contexte d’afflux de réfugiés francophones — planteurs, intellectuels, Acadiens — désireux de préserver leur langue et leur culture. Le journal devient rapidement un espace d’expression pour une société en mutation, intégrant Créoles, affranchis, Européens et esclaves. Il reflète cette diversité à travers des chroniques sociales, religieuses et politiques, tout en accompagnant les débats sur l’avenir du territoire. Face à l’anglicisation croissante des institutions américaines, Le Moniteur incarne une forme de résistance linguistique, défendant le français comme langue publique et éducative dans une époque de transition. À mesure que les francophones se replient dans les bayous, le journal reste un repère identitaire. Son modèle éditorial inspire des titres majeurs comme L’Abeille ou Le Télégraphe. Aujourd’hui, son héritage se perpétue à travers les écoles d’immersion et les initiatives culturelles francophones, témoignant d’une renaissance linguistique et d’un attachement profond à la mémoire collective alors que le français est minoritaire et n'est plus une langue de pouvoir.
Thématiques et héritage éditorial
Le contenu du Moniteur de Louisiane illustre les préoccupations majeures de la société francophone entre la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle. Il publie des annonces commerciales liées à l’agriculture, aux plantations et au développement du port de La Nouvelle-Orléans. Les ventes d’esclaves et les avis de fuite y sont fréquents, documentant à la fois l’économie servile et les tactiques de résistance des personnes esclavisées. Le journal relaie également les lois et décrets des autorités coloniales, structurant la vie locale. Les actualités internationales, notamment européennes, y côtoient les événements culturels et religieux de la région. Enfin, les annonces de spectacles, artisanat et relations sociales témoignent d’une vie communautaire riche et métissée. En évitant les polémiques, Le Moniteur s’impose comme un média fédérateur. Son influence dépasse sa période d’activité, en posant les bases d’une presse francophone engagée, structurée et profondément ancrée dans la réalité louisianaise.
SOCIETE FRANCOSPHERE
A LIRE AUSSI
Notre série Voix enfouies sur la presse francophone en Louisiane
Dans une Louisiane en proie à l’anglicisation, la presse francophone a longtemps été un rempart culturel. Cette série met en lumière ces journaux oubliés qui, plume en main, ont défendu la langue française avec ferveur. À travers leurs combats, leurs éditoriaux et leurs récits, ils ont porté haut une francophonie résistante, ancrée dans l’histoire et la mémoire collective.
Voix enfouies : la presse francophone louisianaise oubliée
le 20 septembre 2025
Nous lançons une série sur la presse francophone ancienne de Louisiane pour souligner le rôle clé de l’écrit dans la préservation linguistique.
Le Moniteur, ancêtre oublié de la presse d'information francophone
le 27 septembre 2025
Premier journal francophone publié en Louisiane en 1794, Le Moniteur de la Louisiane a structuré l’espace public d’une société en mutation.
Le Télégraphe : témoin de la transition culturelle et politique louisianaise
le 4 octobre 2025
Fondé en décembre 1803, juste après la cession de la Louisiane aux États-Unis, Le Télégraphe incarne une presse en mutation.
Le Courrier de la Louisiane : une tribune francophone contre l’effacement
le 12 octobre 2025
Fondé le 14 octobre 1807 à La Nouvelle-Orléans, Le Courrier de la Louisiane s’inscrit dans un contexte de bouleversements culturels.
L’Ami des Lois : un journal entre ferveur révolutionnaire et ordre esclavagiste
le 18 octobre 2025
Fondé en 1809 à La Nouvelle-Orléans, L’Ami des Lois s’inscrit dans le bouillonnement politique et démographique de la Louisiane postcoloniale.
L’Abeille de la Nouvelle-Orléans : témoin majeur de la francophonie louisianaise
le 25 octobre 2025
Fondée le 1er septembre 1827 par François Delaup, L’Abeille s’impose rapidement comme le journal francophone le plus influent de la ville.
Le Meschacébé : mémoire vivante de la Louisiane francophone
le 1er novembre 2025
Fondé le 23 janvier 1853 à Lucy, dans la paroisse de Saint-Jean-Baptiste, Le Meschacébé est un journal emblématique de la presse francophone en Louisiane.
Le Louisianais : voix rebelle de la francophonie louisianaise
le 8 novembre 2025
Fondé en 1865 par Jean Sylvain Gentil, exilé français originaire de Blois, Le Louisianais s’installe à Convent dans la paroisse Saint-Jacques.
Le Méridional : chronique d’un journal bilingue au cœur de la Louisiane
le 15 novembre 2025
De 1856 à nos jours, ce journal d’Abbeville a traversé les époques, portant la voix d’une Louisiane francophone en mutation.
Le Pionnier de l’Assomption : voix d’une paroisse en mutation
le 22 novembre 2025
Le Pionnier de l’Assomption, fondé en septembre 1850 à Napoléonville est le premier journal de la paroisse d’Assumption.
La Gazette de Bâton Rouge : témoin francophone de la Louisiane
le 29 novembre 2025
La Gazette de Bâton Rouge paraît pour la première fois le 3 juillet 1819, dans une Louisiane récemment intégrée aux États-Unis.
Ce contenu vous plait? N'hésitez pas à le partager

Le fil d'information sur la Louisiane
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
© 2025 copyright asteur en louisiane tous droits reserves
à propos | mentions legale | politique de cookies | charte éditoriale