SOCIETE

Le Messager : témoin d’une Louisiane francophone

Fondé en 1846, Le Messager s’inscrit dans une Louisiane encore largement francophone, où circulaient déjà des titres en français.
PAR JC JABOUIN - ASTEUR.LA, SAMEDI 13 DECEMBRE 2025

Une du journal Le Messager du samedi 22 février 1851

Crédit : image Une du journal le Courrier de Houma du 18 janvier 1879

Fondation et contexte
Fondé en juillet 1846 par Alfred Roman, Le Messager s’inscrit dans une Louisiane encore largement francophone, où circulaient déjà des titres comme Le Moniteur de la Louisiane ou L’Abeille de la Nouvelle‑Orléans. Créé par des immigrés français installés en milieu rural, il reflète un environnement marqué par les plantations, la société créole et l’arrivée de réfugiés d’Europe et de Saint‑Domingue. Dans ce paysage foisonnant, la presse francophone joue un rôle central en diffusant nouvelles locales, informations internationales et feuilletons. Le Messager participe ainsi à ce "système francophone de l’information" reliant les communautés d’Amérique du Nord à l’Europe.

Direction et périodicité
Hebdomadaire publié une fois par semaine, Le Messager adopte un format courant dans les campagnes francophones des Amériques. Sa direction éditoriale passe entre les mains de Charles Piéron, et des imprimeurs Charles Moroy et Auguste Lagardère, tous trois Français établis en Louisiane. Le journal paraît de 1846 jusqu’aux débuts de la guerre de Sécession, vers 1861, avant de disparaître dans un contexte de crise politique et militaire. Comme beaucoup de titres de l’époque, il illustre la fragilité des périodiques face aux bouleversements économiques et sociaux, tout en témoignant de la vitalité francophone dans les régions rurales de Louisiane.

Contenu et rôle
Le contenu du Messager mêle nouvelles politiques, chroniques internationales, informations locales, annonces et textes littéraires. Il sert aussi de lieu de sociabilité pour les élites francophones rurales, qui y débattent de religion, culture et politique. Sa couverture de la guerre de Crimée illustre son insertion dans un réseau transatlantique d’information reliant la Louisiane à l’Europe. Dans un État marqué par l’anglicisation progressive, Le Messager contribue à maintenir le français comme langue d’information et de débat public. Il témoigne ainsi de la vitalité des communautés créoles et cadiennes, renforçant leur cohésion et leur visibilité dans l’espace éditorial louisianais.

Né à La Nouvelle‑Orléans en 1824, Alfred Roman était le fils d’André Bienvenu Roman, gouverneur de la Louisiane, et d’Aimée Françoise Parent. Par ses mariages, d’abord avec Félicie Sauvé, fille du planteur Valcour Aime, puis avec Sallie Rhett, il s’unit à deux familles influentes du Sud. Journaliste et éditeur, il fonda Le Messager à Bringier, où il défendit la culture française et les intérêts économiques locaux. Après la Guerre de Sécession, il poursuivit sa carrière au New Orleans Picayune. Officier du 18e Régiment de Louisiane, il servit ensuite auprès du général Beauregard. Devenu juge à La Nouvelle‑Orléans, il publia en 1884 The Military Operations of General Beauregard, ouvrage de référence. Il mourut le 20 septembre 1892 et repose au cimetière Saint‑Louis n°3.

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